En T4 Syncro sur la Route de la Soie
Suite à la proposition de membres du club Camping-Cars sur les Routes de la Soie et du Monde, nous décidons en février 2015 de participer à ce voyage vers l’Ouzbékistan avec notre T4 Syncro.
Nous partons le 15 avril en compagnie de deux camping-cars plus traditionnels (intégraux sur porteur Fiat) après avoir obtenu nos visas pour la Russie et l’Ouzbékistan.
Nous devons être à la frontière ouzbèque le 1er mai où nous attendra Ilhom, notre guide francophone. Deux semaines de voyage assez tranquilles : Allemagne, Pologne, Pays Baltes, Russie, Kazakhstan, seront traversés sans problème, hormis les zones frontières, Russie-Kazakhstan-Ouzbékistan: 300 km de pistes défoncées et poussiéreuses où les camping-cars souffrent et le T4 se régale…
Nous serons à l’heure le jour J et après les formalités d’entrée laborieuses, mais vite réglées grâce à l’aide de Ilhom, nous entrons en Ouzbékistan pour trente jours et pas un de plus, visa oblige !
Encore une centaine de kilomètres de piste infernale et ce sera Noukus, capitale du pays Karakalpak, zone désertique du Kizilkum peuplée par une population de bergers nomades semi-sédentarisés. Certains vivent dans des yourtes.
A Noukus, nous inaugurons le plein de gas-oil au marché noir. En effet, ce carburant n’est pas disponible dans les stations-services et notre guide doit, pour chaque ravitaillement, trouver les lieux de stockage. C’est alors le ballet des jerricans pour le transfert dans nos réservoirs et nous nous interrogeons sur la qualité du précieux liquide. La suite nous montrera que nous avions raison de nous inquiéter : un de nos compagnons de voyage, qui avait le véhicule le plus « moderne » (moteur common-rail) tombera définitivement en panne avant la fin du périple ouzbèque. Après de nombreuses péripéties, le véhicule et ses occupants seront rapatriés en France sur des dépanneuses via la Russie et la Pologne.
Khiva et sa vieille ville fortifiée sera notre première étape sur la Route de la Soie. La ville est toujours habitée et c’est au travers de petites ruelles que nous découvrons les monuments inoubliables aux coupoles bleues : mosquées et leurs gigantesques minarets, madrasas, palais, mausolées et autres caravansérails. Nous passerons deux jours à Khiva et prenons la route de Tachkent la capitale, par des routes secondaires. Elles suivent un moment le fleuve Amu-Darya, qui se jette dans ce qui était la mer d’Aral. Nous voyons bien tous ces champs de coton qui absorbent l’eau de ce fleuve…qui arrive à sec à son embouchure !
Tashkent est une belle capitale entièrement reconstruite après le séisme de 1966. Les mosquées et mausolées aux coupoles bleues sont récents. Les larges avenues sont bordées de superbes façades : les mauvaises langues disent qu’il n’y a rien derrière …Les stations de métro sont pavées et décorées de marbre, aucune pub ni graffiti ne souillent les murs et un ou plusieurs vigiles surveillent les lieux.
Le bivouac à Tashkent sera un peu compliqué : en Ouzbékistan nous devons, lors de la sortie du pays, justifier des lieux où nous passons la nuit. Il n’y a pas de camping et ce ne sont que les hôtels qui peuvent nous donner le sésame, mais certains obligent à prendre des chambres que nous n’utiliserons que pour la douche, les véhicules étant garés au fond des jardins ou parkings…
Ce sera ensuite la vallée de Fergana. C’est la région la plus peuplée du pays et n’est ouverte aux étrangers que depuis 2007 suite à une répression sanglante en 2005. On y trouve toutes les industries lourdes, la fabrication de la soie et des céramiques que nous visiterons. Cette vallée est enclavée entre le Kirgyztan et Tadjikistan, pays en froid avec l’Ouzbékistan. Nous n’avons pas eu de sensation d’insécurité, malgré les nombreux contrôles et la forte présence militaire. Nous aurons l’occasion d’être accueillis dans une petite école où une dizaine de jeunes enfants apprennent le français. Fergana est aussi la vallée du coton, arrosée cette fois par le Syr-Daria, l’autre fleuve se jetant dans la mer d’Aral.
La production du coton est la propriété de l’état qui surveille la productivité de ses travailleurs et les réprime lourdement lorsque celle-ci est insuffisante. Cette activité réprésente 40% du PIB : la mer d’Aral n’est donc pas prête à recevoir l’eau de ses fleuves…
Le retour vers l’intérieur du pays et Samarcande sera « agrémenté » par la panne du Fiat des collègues, citée plus haut. Le véhicule sera remorqué sur 90kms, jusqu’au garage de notre agence à l’aide d’une barre que nous faisons fabriquer afin d’éviter la traction par câble d’acier.
Nous resterons trois jours à Samarcande, cité légendaire de la Route de la Soie et visiterons ses monuments imposants : le Régistan, ensemble de majestueuses madrasas couvertes de majoliques et mosaïques bleu azur, la mosquée Bibi-Khanoum, joyau de l’empire de Tamerlan, une des plus grandes mosquées du monde, l’avenue des mausolées Chah-i-Zinda qui renferme certaines des plus somptueuses mosaïques du monde musulman. Beaucoup d’Ouzbèques visitent ces lieux et nous serons, comme dans tout le pays, l’objet de photos en leur compagnie. S’afficher avec des européens semble être pour eux un grand plaisir.
L’agence nous hébergera dans sa maison d’hôtes durant deux nuits. Pour la troisième, nous bivouaquerons en toute sécurité sur un grand parking proche du parc du Régistan.
Nous continuerons le périple à deux équipages, espérant retrouver nos collègues à Boukhara. Si le Fiat est réparé à Samarcande, ils pourraient nous rejoindre par la route directe. Ce ne sera malheureusement, pas le cas…
Un arrêt de quelques heures à Shahrisabz ville natale de Tamerlan qui vécut au 14ème siècle. Ce fut le grand conquérant de l’Asie Centrale qui reste aujourd’hui le symbole de l’Ouzbékistan. Il ne reste que peu de chose de son palais, mais la ville aménage actuellement un immense parc à son honneur.
Boukhara, cité la plus sainte d’Asie centrale, possède des monuments qui couvrent mille ans d’histoire. Nous y passerons deux jours en bivouac sur une petite place ombragée devant l’hôtel Hovli-Poyon appartenant à notre agence.
Mosquées, madrasas, mausolées, minarets, bazars couverts, petites ruelles habitées, une ambiance conviviale, très villageoise. Il se dit que la restauration des monuments a été effectuée de façon plus subtile qu’ à Samarcande…
Après Boukhara, nous repartons vers le nord et refermons la boucle en retrouvant notre parcours aller près de Khiva. Une dernière incursion dans le désert nous permettra de visiter une des 20 citadelles qui connurent leur apogée entre les 6ème et 7ème siècles de notre ère. Il fait très chaud et nous déjeunerons sous la yourte.
Nous retraverserons Noukus et rejoignons Koungrad d’où nous rendrons à Moynaq sur le rivage de ce qui était la mer d’Aral. Quelques bateaux de pêche rouillés osés sur le sable…
Constater le recul de cette mer est émouvant et déprimant. L’eau est maintenant à cinq heures de 4x4 de Moynaq et n’est pas prête d’y revenir !
Ce sera notre ultime visite dans ce pays si accueillant.
Après, de nouveau, les 300 km de routes défoncées, nous regagnerons le Kasakhstan puis Astrakan, en Russie, où nous retrouverons nos collègues en panne arrivés jusque là avec leur camping-car sur un semi-remorque Ouzbèque. Ils resteront ici deux semaines sans pouvoir être dépannés !
Afin d’éviter les grandes plaines monotones de Russie, nous avions décidé de revenir par le sud via la Géorgie et la Turquie. Le parcours, légèrement plus long se déroula sans problème hormis les monstrueux embouteillages d’Istanbul.
18.000 km, quinze pays traversés, 1.400 litres de gas-oil consommés (sobriété du T4), nous sommes rentrés le 14 juin…
Une crevaison et un changement de batterie auxiliaire furent nos seules interventions « mécaniques » Vive les moteurs anciens !
par Claude Madrias et Isabelle Gallard
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